La présence juive en Provence est plus que millénaire. Elle est également continue, puisque les quatre communautés juives des Etats Pontificaux ont réussi à surmonter la menace de l’expulsion à laquelle avaient succombé les communautés environnantes. Ces survivantes ont pu jouir ainsi d’une existence ininterrompue jusqu’aux temps modernes, grâce à la tolérance traditionnelle et limitée dont les papes successifs ont fait preuve à leur égard, non sans les avoir enfermées au préalable dans leur ghettos respectifs, mieux connus par leur nom provençal de carrières. La carrière de Carpentras abrita la plus importante de ces communautés et sa carrière connut la notoriété. Son histoire est assez bien connue: le contrôle permanent du Recteur apostolique auquel elle était soumise, de même que le recours constant aux services des notaires de la ville ont généré une documentation archivistique importante. Par contre il n’est resté presqu’aucun témoignage interne et hébraïque relatif à sa vie intérieur. Un seul registre a été conservé, qui couvre la seconde partie du XVIIIe siècle. La publication de ce mémorial hébraïque, accompagné de sa traduction française, permettra désormais de prendre connaissance des règlements internes de la communauté de Carpentras, des lois somptuaires qu’elle a dû édicter et de nombreux aspects de sa vie quotidienne. La survivance de cette enclave juive dans un Occident, qui fut loin de leur être toujours favorable jusqu’à la veille de la Révolution, se révélera riche d’enseignements.
Collection de la Revue des Études Juives, 30